drame - fiction sentimentale ou inspirée de faits réels

Un shoot d’adrénaline

Temps de lecture estimé : 5 minutes

Impossible de dormir, je sors du lit excitée comme une puce. Aujourd’hui, c’est le grand jour ! Je dois me préparer : une tenue décontractée s’impose. Dans ma penderie, je déniche un legging noir, un tee-shirt bleu et un sweat confortable et douillet. J’attache mes cheveux en une simple queue de cheval et me voilà partie. Je saute dans ma DS3 et j’enclenche la première, direction le Vercors.

Mon mari m’a fait un super cadeau. Je suis tellement impatiente !

Au pied du massif, le trajet se complique. La route serpente sur le flanc de la montagne offrant une vue imprenable sur les falaises et les gorges qui se succèdent. Elle est glissante en cette matinée de Janvier. Je dois absolument adapter ma conduite. Les pneus de ma petite DS crissent dans les graviers et glissent sur le verglas. Je jette un coup d’oeil dans le rétro et je vois une voiture qui gravit les lacets à vive allure. Le chauffeur est dingue ! Il se rapproche vite. Il me colle comme s’il voulait me pousser dans le précipice. Je me serre un peu pour le laisser passer !  Mes mains se crispent sur le volant. Cette route est interminable. Allez passe et laisse-moi tranquille !

Arrivée au pont de Ponsonnas, je me gare et j’essaie de faire redescendre la tension qui m’étreint. Je respire un grand coup et je rejoins le groupe. Ah Tiens ! C’est la voiture de tout à l’heure. Qu’est-ce qu’elle fait là ? J’observe avec inquiétude les gens autour de moi. Qu’est-ce qu’il fait le type habillé en noir là-bas ? Il a l’air suspect. Pourquoi il regarde les élastiques ? Qu’est-ce qu’il a dans la main ? Un couteau ? L’angoisse monte mais je suis tirée de mes pensées par le moniteur qui m’accueille en souriant. 

Il me donne une fiche et je m’éloigne pour la remplir. Un petit groupe échange à côté de moi. Je tends l’oreille pour écouter la conversation :

– J’ai la trouille, dit une jeune fille. Si l’élastique pète, je vais m’écraser comme une crêpe.

– Mais non, t’inquiète, tente de la rassurer son copain. Ça craint rien !

– Oui, ben moi, j’en suis pas sure, insiste-t-elle. Il y a eu un accident dans le Calvados, l’élastique s’est cassé et le mec a eu de la chance, il a fini sa chute dans l’eau. 

Mon estomac se noue. J’aperçois le type qui m’a suivie. Il est toujours vers le matériel. Il a saboté l’élastique ? Je devrais peut-être renoncer. Un accident est si vite arrivé. Mon pouls s’accélère. Je regarde autour de moi, le type a disparu. Il se cache peut-être pour être aux premières loges. 

Le moniteur commence son débrief. Il ne rigole pas avec la sécurité. Je ne sais pas si c’est rassurant ou encore plus stressant. Il est vrai que se jeter dans le vide à cent trois mètres de haut, c’est périlleux. Mes oreilles bourdonnent. Je tente de me concentrer mais mon esprit revient inlassablement sur le mot danger qui clignote en rouge dans ma tête. Je ne vois plus le type. Il est passé où ?

Le débrief terminé, plusieurs personnes se succèdent et se jettent dans le vide. Je n’entends que leur cri. Le doute m’étreint et serre ma poitrine comme un étau.

Je cherche le type. Ah le revoilà ! Il se cache derrière la cabane en bois. Il est vraiment bizarre. Il m’espionne ? 

Mon estomac se contracte un peu plus fort. Le moniteur me regarde d’un air interrogateur :

– Prête ?

Il s’approche de moi et m’équipe. Je me laisse faire tétaniser par l’angoisse. Il s’adresse à son collègue :

– Donne-moi un autre élastique !

– Pourquoi vous le changez maintenant ?

– On le change tous les vingt sauts.

J’observe avec effroi son collègue qui cherche un élastique de l’autre côté de la cabane, à l’endroit même où se trouvait le type en noir. J’aurai dû sauter plus tôt. Ma tension monte encore d’un cran. Je panique : le type est en train de discuter avec le collègue du moniteur en m’épiant. Mais qu’est-ce qu’il veut ? Pourquoi il me dévisage comme ça ? Je suis sure qu’il a saboté le matériel ? 

Je demande au moniteur de revérifier mon équipement et l’élastique. Puis, poussée par je ne sais quelle force, je grimpe sur la plateforme. Le vent souffle très fort et la fait vibrer. Je perds l’équilibre. Le moniteur me rattrape et me sourit bizarrement. Il est complice avec le type ? Je devrais peut-être abandonner…

Je regarde le vide qui m’aspire et me repousse. C’est bizarre cette attirance répulsive. C’est vertigineux et effrayant. Je suis au bord du gouffre, incertaine, hésitante. La peur crispe mon ventre. Mon coeur s’affole, mes jambes et mes mains tremblent, mon souffle est court. Je sens un mouvement rapide derrière moi. Une ombre furtive passe. Je fais un pas en arrière prête à renoncer. 

Je ferme les yeux quelques secondes pour me calmer. J’inspire et j’expire lentement en me disant arrête t’es complètement parano ! Mon coeur ralentit, ma respiration s’apaise. Le moniteur commence le décompte :

– 5, 4, 3,…

Il n’a pas le temps de terminer que je sens une main dans mon dos ! C’est pas vrai ! Quelqu’un me pousse. Je hurle ! Je tombe mais le choc de l’adrénaline est tel que la peur et l’angoisse disparaissent instantanément remplacées par les sensations fortes. Le paysage défile à une allure folle. Le sol se rapproche. Ma tête frôle les rochers de granit. Je vais m’écraser. Le sang tambourine dans mes tempes. J’ai l‘impression que mon crâne va exploser. 

Soudain, j’entends un craquement. Mon Dieu, l’élastique cède ! Je m’affole, je me tortille. Je hurle à nouveau : non, pas ça, pas maintenant ! Je suis trop jeune pour mourir…

D’une secousse, je remonte vers le haut. Puis, je me balance en faisant le yoyo. Quand le va-et-vient s’arrête, le type en noir me détache et me sourit. Je pose les deux pieds au sol en titubant légèrement et je le regarde les yeux écarquillés.

– Tout va bien ? me demande-t-il.

– Oui, c’est dingue cette sensation ! dis-je un peu embarrassée. Quelle émotion incroyable !

Avec un client d’oeil, j’ajoute :

– La prochaine fois, je fais un saut en parachute !

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